dimanche 22 février 2009
un chant crépusculaire avec (un peu ?) d'espoir
Les éditions Grasset sont de petits coquines. ELles vendent 11 euros le voyage dans le passé de stefan Zweig, avec cette astuce vraiment finaude : pour faire genre "on vend un livre un vrai", ils publient à la suite de la nouvelle traduite, le texte en allemand, le tout avec une préface plus qu' indigente.. (il ne me semble pas y avoir lu quand elle avait écrite... le héros va au Mexique, a-t-elle écrite lors de l'exil à mexico de Zweig là où il s'est suicidé ?)
Pourtant un inédit de zweig c'est pas rien, surtout quand il est aussi sublime que ce voyage dans le passé.. J'ai longtemps pensé (aujourd'hui je suis moins à avoir des avis aussi définitifs) que le joueur d'échecs est le plus grand livre écrit sur la solitude.
Si j'aimais encore ce genre de formules "le plus grand livre sur", le voyage dans le passé est peut être sinon le plus grand livre sur le désir, du moins le plus boulversant.
Voyageant avec son amant, la discrète héroïne hésite à descendre du train qui les amène dans une ville où ils vont enfin (?) vivre leur amour. Ce périple en train est donc comme l'acmé de la nouvelle. Au moment de descendre elle hésite et à cette phrase sublime : "Cest dommage. c'était si beau. on est allé si vite. J'aurais aimé que ça continue des heures et des heures". dans son contexte la phrase est pour le moins paradoxale, les deux amants ne se sont pas vus depuis plusieurs années.
Contraiterement à ce que pense mon amie Anne G., je ne crois pas que ce soit un texte inachevé. Certes, on ne sait pas ce qu'il advient des personnages. mais cette nouvelle a des allures de pastel. les couleurs s'estompent déjà.. la tonalité est crépesculaire on sent comme jamais chez zweig le poids du temps, Zweig n'y convoque pas pour rien les fantômes..
Si le texte n'est pas clos, j'ai envie de croire que c'est parce que Zweig voulait encore croire, que le passé peut se rattrapper, qu'il avait encore un peu d'espoir.
Sur ce texte, j'aurais aimé que les éditions grasset nous livrassent à défaut du texte allemand, une analyse d'un connaisseur distingué de Zweig. A la lecture, il m'a semblé avoir noté quelques faiblesses, quelques clichés dans l'écriture, qui ne sont pas dans l'habitude du grand Stefan. Zweig a-t-il relu son texte ? A-t-il pu le corriger ? je serai tenté de répondre non...
Cela me donne envie de parler d'un de mes personnages préférés de la vie littéraire : Max Brod (ou Bord je ne sais plus). Il était l'ami le plus fidèle de Kafka, et vu comment était Kafka, être son ami fidèle est une grande chose.
A la mort du génie tchèque, Kafka avait demandé à son ami de brûler tous ces textes. je crois me souvenir que Kafka n'avait jamais rien publié. On connaît donc son oeuvre géniale grâce à la trahison d'un ami. et je me demande toujours aujourd'hui (j'ai lu le procès j'avais moins de 20 ans), si le fait d'avoir porté à la connaissance du plus grand nombre l'Oeuvre de son ami mort pardonne d'avoir manqué à sa parole.
A-t-on le droit de trahir les grands écrivains ? Ne s'appartiennent-ils plus ?
lundi 9 février 2009
Le Je Nous s'éclaire
L’an dernier a paru un livre que je voulais lire (ça tombe bien pour un livre) et puis la vie… pas besoin de faire un dessin. Il y a ce qu’on voudrait faire et ce qu’on fait. Il n’en reste pas moins que le titre - Qui dit je en nous ? de Claude Arnaud - me plaisait beaucoup, comme L’avenir dure longtemps d’Althusser… Quand un titre est aussi génial on a toujours peur de ne pas trouer un livre à la hauteur.
Par le plus grand des hasards, je viens de lire deux fictions parues aux éditions verticales qui font écho à ce titre. Ce n’est sûrement pas un hasard, tant verticales n’est pas une maison de hasard mais un lieu où la pensée est.. pensée et la littérature considérée.
A ma gauche Ma solitude s’appelle brando d’Arno Bertina ; à ma gauche La parenthèse espagnole de Sylvie Gracia. A l’écriture fragmentée de l’un (arno bertina) répond le chœur à une voix de l’autre (sylvie gracia).
Bertina fait le portrait d’un vieil oncle par touches, montrant très bien comment le portrait d’une personne particulière n’est pas séparable de celui d’un groupe, en l’espèce sa famille. Comment il ne saurait y avoir d’oncle rebelle sans la famille bourgeoise, comment l’un et l’autre sont l’envers et l’avers de la même pièce (du théâtre de nos identités ?). ..
Sylvie Gracia choisit le monologue ou le récit d’un homme. Un texte écrit à la première personne. Au fil des pages, pourtant, le Je n’est plus. Il n'est que dans la mesure où il est charnière. Il est son grand père et son amour de jeunesse, il est les républicains espagnols transmis de la mémoire familiale et le père d’adolescentes. Le Je qui écrit au présent est-il encore celui qui vivait hier.
Je me souviens alors de mes études d’économie. On y étudiait les deux grands paradigmes des sciences humaines l’individualisme versus le holisme. Pour faire vite, d’un côté la théorie libérale qui ne reconnaît que des individus , de l’autre les approches à la marx où l’on étudie les grands mouvements de l’Histoire, où l’individu n’a pas d’autre place que celle assignée par des mécaniques qui le déplacent (c’est un lapsus mais il est beau, je le laisse, je voulais écrire dépassent). Macro contre micro, partie contre le tout…
Ce que ces deux récits démontrent finalement :
- c’est qu’il n’y a pas de je sans un nous (Bertina).
- Quand j’écris moi, je parle toujours d’un nous (gracia)
Rimbaud disait Je est un autre
Gracia et Bertina lui répondent avec grand talent : Je est un Nous.
Et vous ?
Par le plus grand des hasards, je viens de lire deux fictions parues aux éditions verticales qui font écho à ce titre. Ce n’est sûrement pas un hasard, tant verticales n’est pas une maison de hasard mais un lieu où la pensée est.. pensée et la littérature considérée.
A ma gauche Ma solitude s’appelle brando d’Arno Bertina ; à ma gauche La parenthèse espagnole de Sylvie Gracia. A l’écriture fragmentée de l’un (arno bertina) répond le chœur à une voix de l’autre (sylvie gracia).
Bertina fait le portrait d’un vieil oncle par touches, montrant très bien comment le portrait d’une personne particulière n’est pas séparable de celui d’un groupe, en l’espèce sa famille. Comment il ne saurait y avoir d’oncle rebelle sans la famille bourgeoise, comment l’un et l’autre sont l’envers et l’avers de la même pièce (du théâtre de nos identités ?). ..
Sylvie Gracia choisit le monologue ou le récit d’un homme. Un texte écrit à la première personne. Au fil des pages, pourtant, le Je n’est plus. Il n'est que dans la mesure où il est charnière. Il est son grand père et son amour de jeunesse, il est les républicains espagnols transmis de la mémoire familiale et le père d’adolescentes. Le Je qui écrit au présent est-il encore celui qui vivait hier.
Je me souviens alors de mes études d’économie. On y étudiait les deux grands paradigmes des sciences humaines l’individualisme versus le holisme. Pour faire vite, d’un côté la théorie libérale qui ne reconnaît que des individus , de l’autre les approches à la marx où l’on étudie les grands mouvements de l’Histoire, où l’individu n’a pas d’autre place que celle assignée par des mécaniques qui le déplacent (c’est un lapsus mais il est beau, je le laisse, je voulais écrire dépassent). Macro contre micro, partie contre le tout…
Ce que ces deux récits démontrent finalement :
- c’est qu’il n’y a pas de je sans un nous (Bertina).
- Quand j’écris moi, je parle toujours d’un nous (gracia)
Rimbaud disait Je est un autre
Gracia et Bertina lui répondent avec grand talent : Je est un Nous.
Et vous ?
Inscription à :
Articles (Atom)