lundi 11 mai 2009
collision
Cela fait longtemps que je n'ai pas alimenté le blog. deux feuillets par jour, c'est pas si simple que ça quand on en abat déjà quelques-uns dans la journée. Et l'impression diffuse que la vie est ailleurs. Qu'être devant un écran, ça fait justement écran entre le monde et moi. Comme une envie d'immédiateté, de faire fi des intermédiaires..
Voilà pour l'humeur..
Récemment, invité par une entreprise qui présentait ses résultats. Cadre plutôt luxueux, nourritures exquises et le jeu habituel. L'invitant n'a qu'un but : faire avaler en même temps que le gaspacho d'artichaut SA vision des résultats de son entreprise. Le discours a été préparé, les réponses sont blindées.. la routine. En l'espère, je m'en fichais un peu, j'étais surtout venu pour voir. je savais que je ne ferai pas d'articles sur le sujet... ce genre de rencontres sert aussi à tisser un réseau de connaissances. le jour venu, quand une actualité chaude a lieu, on peut espérer interviewer directement le pdg car il vous connaît.. c'est ça le métier de journaliste aussi..
En l'espèce, l'hôte est intelligent et drôle. il a bien compris qu'il ne servait à rien de trop blinder. il reconnaît des difficultés dans tel ou tel secteur avec une franchise étonnante, en tout cas qui n'est pas la norme... on passe à l'entrée après le potage, les tableaux de chiffres se succèdent et les interlocuteurs s'enchainent : directeur financier, responsable commercial, directeur général... et alors qu'on commence le pavé de poisson à la plancha la phrase tombe comme un cheveu dans la soupe : "face à la crise nous avons réduit la masse salariale".. et d'enchainer sur le niveau de la trésorerie "une bonne nouvelle". je reprends du vin, un bordeaux rouge, j'écoute le bruit des fonds des résultats financiers, les pronostics des uns et des autres sur la sortie de crise les questions des confrères autour de la table.. et alors que le dessert arrive - somptueux comme le reste, splendeur visuelle et raffinement du goût doit écrire le traîteur sur son site Internet - la réduction de la masse salariale me revient. et le décalage avec nos agapes.
L'image de l'employé licencié,ou dont le contrat n'a pas été renouvelé me saute à la gueule. J'imagine ses courses chez le hard discounter (c'est plus chic qu'épicier du pauvre). D'autres images claquent devant mes yeux. l'enfance, mes parents sûrement un peu serrés en fin de mois, les dîner où on mangeait des sardines à l'huile et des pâtes (mes deux plats préférés aujourd'hui encore).. parce qu'on "réduisait déjà la masse salariale".
avec le café, il y avait de mini macarons, parfums version originale. Un vrai délice, plus élaboré que la sardine à l'huile. J'ai été bien élevé, je suis parti en serrant la main du président de la société. Un homme de petite taille, autodidacte, qui doit aussi avoir connu des repas frugaux en d'autres temps. Entre-temps, un accident cardiaque l'a ratrappé et lui interdit alcools et les mets trop sucrés m'explique-t-il, alors que je le remercie de son hospitalité.
Marchant dans les rues cossues du XVI arrondissement, à la recherche de mon vélo attaché à un arbre, je suis la prise d'idées contradictoires. Le ciel d'avril est d'un bleu optimiste. J'enjambe ma bicyclette, prends l'avenue d'iéna. L'air est décidément doux. L'optimiste est de mise... Arrivé à la rédaction, j'ai pris ma décision : je ne fais pas d'articles sur les résultats financiers. l'argent du repas sera perdu pour tout le monde.
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